Bich Van NGO invitée découverte
- Expert-comptable, Président Directeur général de Ngo Audit et Conseil
- Administrateur de la BFCM – Banque Fédérative du Crédit Mutuel,
- Membre du comité d’audit de Crédit Mutuel Alliance Fédérale
- Ancien membre du Rotary Club de Verrières le Buisson
Maîtrise d’Economie à l’Université Paris IX Dauphine
Diplômée d’expertise comptable
Certificat Administrateur de Société à Sciences Po Paris & Institut Français des Administrateurs (IFA)
Présentation
Monsieur le Gouverneur de la Province de Luxembourg,
Messieurs les Présidents des Rotary clubs d’Attert, Sûre et Semois, de Bastogne et de Neufchâteau
Monsieur le président du Jury, Mesdames et Messieurs membres du jury,
Mesdames et Messieurs, Chers amis Rotariens
Tout d’abord je vous remercie très sincèrement de m’avoir invitée à cette soirée Upgrade qui portent les valeurs rotariennes qui sont aussi les miennes. Je suis très honorée et heureuse d’être parmi vous, ce soir.
Je vais ainsi vous apporter le témoignage de mon parcours, celui d’une immigrée venant du Vietnam.
Mon histoire a commencé au Vietnam, mon pays natal où j’ai vécu jusqu’à l’âge de 18 ans. Je suis la benjamine d’une famille de 9 enfants, famille je dois le dire, assez modeste.
Mes parents ont très vite compris que le seul moyen d’aider leurs enfants à s’en sortir, serait la voie des études. Et malgré leurs faibles moyens, j’ai eu la chance d’être admise au prestigieux lycée français de Saigon.
Il faut que je précise que la guerre du Vietnam ayant duré 30 ans jusqu’en 1975, j’avais 16 ans, en 1972, quand une pulsion de vie s’est imposée à moi. Je voulais savoir enfin ce que signifiait de vivre et de grandir dans un pays en paix.
Je me suis battue auprès de mes parents pour avoir le droit de partir en France faire des études supérieures. Ma sœur m’a donné un billet d’avion.
Je peux vous dire et je ne sais pas pourquoi, je suis partie avec une réelle confiance et sans aucune peur de cette grande ville et de ces gens que je ne connaissais pas. Je savais que quelque chose m’attend là-bas et j’étais prête à faire tous les efforts pour atteindre mon rêve.
Je ne vous cache pas que j’ai vécu des moments difficiles. J’ai dû très vite travailler parallèlement à mes études, pour subvenir à mes besoins. Je me souviens de ces premières années à Paris. Il faisait si froid, je me faisais bousculer dans le métro parisien car je ne marchais pas assez vite. La veille d’un Noël, je rentrais par un train de banlieue, après une journée chargée de travail dans un grand magasin. J’étais harassée, l’ambiance était aux fêtes, mais j’étais triste, seule loin de ma famille.
A ces moments-là, l’idée du dépassement de soi pour atteindre mes objectifs ne me quittait pas et m’aidait à tenir.
Il y a eu aussi de très bons moments, les sorties entre copains, les soirées à n’en plus finir entre étudiants de toutes origines, qui je le réalise, m’ont ouvert une large fenêtre sur le monde.
Dans ce parcours, j’ai la chance que mes parents aient pu me rejoindre quelques années plus tard. Une fois ma maitrise d’économie en poche, j’ai construit ma propre famille en me mariant avec un compatriote. Nous avons ensemble, quelques années, après un fils dont je suis très fière.
Mais la confrontation avec le monde du travail n’a pas été chose facile, même avec un diplôme prestigieux, en tant qu’étrangère et n’ayant pas l’autorisation de travail.
C’est grâce à un contrat d’apprentissage en comptabilité de KPMG que j’ai pu rentrer dans la profession comptable qui je vous l’avoue, n’était pas ma passion première. Mais le diplôme d’expertise comptable m’a fait m’ancrer dans le métier que j’aime désormais profondément.
Sachant que quand j’avais commencé à travailler, j’ai toujours travaillé et occupé des postes avec de plus en plus de responsabilité, passer l’expertise comptable a signifié pour moi passer les unités de valeurs une par une, des cours du soir, des cours par correspondance. Ce qui m’a valu, pour l’obtenir, encore 13 ans après la maîtrise d’économie.
Je n’ai pas négligé pour autant ma vie de famille. J’ai eu notre fils quand j’avais 25 ans. Et j’ai mené de front comme beaucoup de femmes, le fait de pouvoir se réaliser aussi bien sur le plan professionnel que sur le plan personnel. J’ai bien conscience que la vie trépidante de chef d’entreprise, que j’ai pu mener de front avec ma vie privée aussi riche qu’épanouissante, je la dois au soutien inégalable de mon conjoint et de ma famille.
A 34 ans, après avoir pris la direction financière d’une première PME, j’ai rejoint un groupe international d’audit pour être Présidente d’une filiale spécialisée sur l’Europe du Nord. Lorsque cinq ans après, le groupe m’a proposé de devenir associée et d’intégrer le comité de direction, j’ai refusé cette offre pourtant alléchante et pris la décision de créer mon propre mon cabinet.
Après tant d’années de formation, d’expérience et d’expertise, je savais que le moment était venu pour moi d’acquérir cette indépendance, cette liberté d’action à laquelle je tenais depuis toujours. J’ai donc pris le risque sans une réelle assise financière, de me lancer dans l’aventure entrepreneuriale et humaine.
Par mon savoir-faire sur le plan international, j’ai pu développer le cabinet non seulement vers les missions classiques d’expertise comptable et d’audit auprès des start-up, des PME, mais également en accompagnant de grands groupes cotés en bourse, français et internationaux.
Avec un cabinet à taille humaine (nous étions une quinzaine), nous avons réussi à offrir une qualité de services qui est et restera ma vision majeure du monde du travail. J’ajouterais que la confiance en soi et la confiance des autres ont permis à notre cabinet de se développer.
Être leader de PME, comporte des avantages comme de pouvoir gérer les projets de A à Z, avoir moins de hiérarchie. On se situe moins sur le plan de la politique et le statut que sur celui d’une performance globale et incarnée.
Mais cela comporte également des difficultés. Il a fallu :
- avoir ce que l’on appelle une « vision hélicoptère ». Cette capacité à prendre de la hauteur puis à descendre dans le détail ;
- décider vite dans des contextes des fois incertains voire ambigus ;
- avoir une résistance au stress. Travailler dur, entrainer son équipe et ses clients, les accompagner et les soutenir. Alors, il est indispensable de prendre soin de son propre capital. Et les clés pour moi, c’est accepter l’échec avec une bienveillance exigeante, pratiquer la méditation.
Ma carrière s’est déroulée dans des environnements professionnels plutôt masculins. Même si j’ai pu ressentir parfois que la présence d’une femme et de surcroit étrangère et de petite taille pouvait intriguer, je n’ai jamais souffert de ce regard, je pense en avoir plutôt bénéficié. On se souvient mieux de l’exception.
Transformer mes faiblesses en forces, c’est ma devise.
Il y a aussi la diversité par la mixité hommes/femmes, par les origines, elle constitue à mes yeux un facteur de progrès. La diversité révèle les complémentarités. Il faut « savoir oser » imposer un profil différent et c’est une opportunité pour développer son leadership et accélérer son intégration.
Il y a deux ans, nous sommes partis vivre au Luxembourg. Nous voulons nous rapprocher de notre fils et de sa famille, s’occuper de nos trois petits-enfants. Même si la rupture n’est pas aussi grande que lors de mon départ du Vietnam en France, il s’agit néanmoins à nouveau de tourner une nouvelle page.
En mars de cette année, un nouveau défi, cette fois-ci sur le plan de la santé. J’ai été opérée d’une hémorragie sous-durale. Lors de l’opération, le chirurgien a heurté accidentellement mon cerveau. 3 semaines à l’hôpital, sans avoir aucune visite à cause des restrictions dues à la covid 19, avec les perspectives d’une deuxième opération. Je vous l’avoue, face à l’idée de la mort ou d’un handicap mental grave, j’ai eu peur, j’ai été des fois au bord de la déprime. Mais je me suis relevée avec l’aide de ma famille, de mes amis, de l’équipe soignante, et également par la pratique intensive de la méditation. La méditation m’a d’ailleurs beaucoup aidé dans la gestion des douleurs post-opératoires et dans la reconstruction de soi.
Durant toute ma vie et dans les épreuves, la passion de la lecture m’a vraiment beaucoup aidé.
Je me plais aux livres de réflexion comme « L’Art du bonheur », entretiens d’Howard Cutler psychologue américain avec le Dalaï-Lama, sur le sens de la vie et la recherche du bonheur,
ou « L’Art de la Guerre » de Sun Tzu, quintessence de sagesse dans l’art de vivre, stratégies applicables non seulement au domaine militaire, mais également à celui des affaires, de la politique ou de la société.
Ce soir, je suis très heureuse de partager avec vous mon parcours, certes avec des difficultés mais aussi avec beaucoup de joies et d’espérance.
Je suis convaincue que l’on peut réussir malgré nos handicaps, par la force du travail, la volonté, la persévérance, la confiance en soi et aussi le coup de pouce providentiel que l’on pourrait avoir. En ça, l’action Upgrade est formidable !
Je vous remercie de votre attention.